L’année 2020 promettait d’être une année faste pour la protection de la biodiversité. Mais la pandémie de coronavirus nous a rappelé une vérité : la santé humaine et de la planète sont liées ; détruire les habitats naturels nous expose à de nouvelles maladies provenant des animaux.
Il n’y pas de solution simple pour lutter contre la déforestation car elle a des causes multiples : agriculture prédatrice, commerce illégal du bois, exploitation effrénée des matières premières, le tout pour satisfaire la demande internationale. Elle est aussi le résultat de lois forestières injustes et de la corruption.
S’il n’y a pas de recette magique, de nombreuses études prouvent que l’inclusion des populations les plus concernées, à savoir les communautés locales et les peuples autochtones qui dépendent des forêts pour leur survie, réduit la déforestation et enrichit la biodiversité. On comprend donc l’importance de les associer à l’élaboration et au suivi des politiques forestières nationales et internationales
Trop souvent malheureusement, on assiste à un radicalisme de la conservation, imposé de l’extérieur, qui rejette les peuples autochtones en périphérie de leur territoire. Il existe de nombreux exemples projets de conservation financés par l’aide internationale et qui ont mal tourné de ce point de vue. Le dernier en date est celui de Messok Dja, situé au Nord Ouest de la République du Congo, où des écogardes sont accusés d’avoir violenté des membres du peuple autochtone Baka et de leur avoir interdit l’accès à leur territoire ancestral. La Commission européenne a réagi en annonçant suspendre son soutien financier à ce projet chapeauté par le WWF, ce que nous saluons.
Nous, Européen.ne.s, sommes co-responsables de la destruction des forêts mondiales. Nous sommes parmi les plus gros importateurs de denrées agricoles tel le soja, le cacao ou encore l’huile de palme, dont la culture détruit les forêts. Nous sommes aussi de grands importateurs de bois. Premier pourvoyeur mondial d’aide au développement, l’Union européenne a donc le devoir, et les moyens, d’accompagner la transition dans les pays en développement et de lutter contre les causes structurelles de la déforestation et de l’exploitation illégale du bois.
La Commission européenne a récemment publié sa nouvelle stratégie pour la biodiversité pour 2030. Elle y fixe des objectifs de conservation en Europe mais aussi hors de notre continent, où se situent les principaux pôles de biodiversité de la planète. Elle propose, à ce titre, une nouvelle initiative dénommée « NaturAfrica », dont le but est la protection d’espaces naturels en Afrique. Il faut nous saisir de cette occasion pour y défendre les droits des peuples autochtones.
Donner aux plus vulnérables voix au chapitre
Afin d’assurer que la stratégie européenne biodiversité 2030 ne se fasse pas en violation des droits humains et contribue vraiment à la lutte contre la déforestation, il est impératif que NaturAfrica, ainsi que toute initiative européenne de protection de la nature, soit élaborée en consultation avec les communautés locales, les peuples autochtones et les femmes.
Le « consentement libre, informé et préalable » des peuples autochtones, au fondement de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, doit redevenir central. Les programmes de développement européens doivent contenir en leur cœur ce principe élémentaire de participation. Au Parlement européen comme dans d’autres instances de dialogue, nous nous battrons pour que de vraies garanties existent pour les peuples autochtones à l’avenir.
Marie-Ange Kalenga est Conseillère en politiques « Forêts, Gouvernance et Développement » pour l’ONG Fern
Michèle Rivasi est eurodéputée Europe écologie-Les Verts, membre de la commission parlementaire européenne sur le développement