Pour la société civile environnementale en RDC, la foresterie communautaire est un mécanisme de développement pour les communautés locales tributaires des forêts. Depuis quelques années, nombreuses parmi ses membres se sont investis en plaidoyer et en actions afin d’aboutir à son opérationnalisation. Mais ce processus requiert de nombreuses étapes et, encore plus, un environnement règlementaire, sociale et économique pour sa mise en œuvre intégrale.
Toutefois, l’implémentation de la foresterie communautaire passe par l’adoption des outils de sa mise en œuvre, qui vont aider et simplifier l’acquisition et la gestion des concessions des forêts communautaires. Ces outils, adoptés par les différentes parties réunies le 13 décembre 2017 à Kinshasa, avec l’appui du World Resource Institute (WRI) et financé par l’USAID, sont un guide pour l’acquisition et l’appropriation des concessions forestières par les communautés forestières.
Les outils relatifs à la gestion et l’exploitation des concessions forestières des communautés locales (CFCL), ou forêt communautaire, sont élaborés avec l’implication de toutes les parties prenantes de la foresterie communautaire. Ils sont indispensables pour assurer que les CFCL sont implémentées de manière cohérente conformément aux exigences légales et aux standards de bonne gouvernance et de gestion durable des forêts. Ils peuvent dès lors être considérés comme des normes techniques et pratiques appelées à faciliter la mise en œuvre des différentes phases du processus sur terrain (attribution, gestion et exploitation).
Au total trente-neuf outils de mise en œuvre des CFCL ont été adoptés conformément à l’article 75 l’arrêté N° 025/CAB/MIN/ECN-DD/CJ/00/RBM/2016 du 09 février 2016 portant dispositions spécifiques relatives à la gestion et à l’exploitation des CFCL. En RDC, l’administration centrale est l’autorité en charge de l’élaboration et la publication des outils de foresterie communautaire de manière participative.
Les trente-neuf outils de mise en œuvre des CFCL sont un ensemble de modèles de documents que les communautés peuvent adapter pour acquérir et gérer leurs propres forêts communautaires. Ainsi, l’on retrouve des modèles de procès-verbal, de permis de coupe communautaire, contrat de gestion, etc. Parmi eux, seuls huit outils concernent les communautés et le reste est du ressort de l’administration.
En ce qui concerne le coût des étapes préliminaires de la mise en œuvre de la foresterie communautaire, l’élaboration des outils demande un investissement minimum des communautés et les outils simplifient le processus en la rendant peu couteuse pour cette dernière. « Tous les trente-neuf outils ne seront pas utilisés en même temps, mais plutôt en fonction des activités à mener dans la forêt communautaire. Le cout est une contrainte du processus, mais il y a besoin de renforcement de capacité pour comprendre les outils », précise Théo Way, coordonnateur de la Foresterie communautaire à WRI.
Sous l’impulsion de la société civile, le ministère de l’environnement et du développement durable s’investit depuis le début du processus de la foresterie communautaire, en mettant notamment en place une division de la foresterie communautaire au sein du ministère de l’environnement et du développement durable de la RDC.
Ainsi, l’administration a la charge d’élaborer et publier les contrats d’exploitation et de gestion de la concession forestière des communautés locales, d’élaborer et publier le modelé de permis de coupe communautaire et d’assurer la supervision de la gestion des CFCL.
Il est à noter qu’à l’issue de l’adoption, les parties prenantes présentes à ces assises ont proposé que les outils restent des modèles non contraignants pour donner l’opportunité aux communautés locales de concevoir leurs éléments de dossier et pour permettre l’adaptation aux multiples réalités locales, ainsi qu’ils soient traduits en langues nationales pour une compréhension facile.
D’un point de vue juridique, en RDC, la foresterie communautaire confère le pouvoir de décision sur les questions d’intérêt local en vue d’un développement de la communauté locale. Ceci pour lutter contre la centralisation des décisions qu’a connues le pays tout au long de son histoire. Cette responsabilité se traduit par le découpage et la délimitation d’une partie du territoire national au profit d’une entité locale. Les locaux eux-mêmes décident de la délimitation de leur propre portion de forêt. La foresterie communautaire consolide la possession coutumière des cl en les mettant à l’abri des excès du pouvoir central sur l’attribution des terres.
» La foresterie communautaire offre un véritable ancrage institutionnel et opérationnel pour la bonne collaboration et la bonne coopération entre les gouvernants et les gouvernés à l’échelle locale et donne une bonne base pour un espace d’entraide entre l’État et les entités locales », explique Me Augustin Mpoyi, de l’ONG CODELT.
En prévision de conflits qui pourraient naitre au sein des communautés, les peuples autochtones ont participé à l’élaboration des outils de mise en œuvre de foresterie communautaire. Ainsi, un protocole d’accord entre les bantous et pygmées est élaboré afin de favoriser l’entente entre les deux communautés dans une approche d’entente dans les zones où elles cohabitent. Cette approche consiste en la gestion participative et cohérente et non-conflictuelle des ressources naturelles des CFCL pour assurer un partage équitable des bénéfices entre les deux communautés.
La foresterie communautaire telle que organisée en RDC n’a rien de commun d’avec la foresterie communautaire organisée dans d’autres pays comme le Cameroun, Gabon, Tanzanie… Il s’agit plutôt d’une foresterie résiduelle qui permet la reconnaissance légale des droits d’usage et de jouissance forestiers. Elle ne peut pas permettre un développement communautaire ou territorial. Elle ne peut non lutter contre le changement climatique aussi longtemps qu’elle est assise sur des forêts coutumières.
Elle est organisée en violation de l’esprit de la FAO qui a lancé ce concept en 1978.