Face à la menace de la désertification, des initiatives comme l’Opération Sahel vert, jusqu’ici explorées n’ont véritablement pas pu stopper, le Cameroun adhère au projet de la Grande muraille verte pour limiter les dégâts de l’avancée du désert.
A côté de l’eau qui est une denrée rare dans la partie Nord du Cameroun (Plus d’une journée de voyage de Yaoundé), le bois de chauffe reste difficile à trouver. Pas aisé du tout pour les populations de cette partie du pays, qui ne disposent pas des ressources pouvant les aider à se procurer d’autres sources d’énergie. Cette situation affecte une population estimée à cinq millions d’habitants, selon les résultats du recensement général de la population et de l’habitat de 2005.
« Ici à Maroua, chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord (situé à plus de dix heures de voyage de Yaoundé (Ndlr), l’eau et le bois sont comme la manne avec laquelle Dieu a nourri son peuple dans le désert », soutient Martine Bouba. A 30 ans, cette mère de trois enfants relève que même s’il est facile de trouver de l’eau dans des forages et des puits de fortune qui se remplissent pendant la saison pluvieuse, le bois au contraire disparaît chaque jour qui passe.
Les enfants sont de moins en moins mis à contribution pour l’approvisionnement des familles en eau. Mais ils doivent faire la corvée du ravitaillement en bois pour pouvoir chauffer la marmite. Dans la majorité des cas, c’est aux femmes et aux enfants qu’incombe la tâche de puiser de l’eau et de chercher du bois. « Nous parcourons des dizaines de kilomètres pour trouver un morceau de bois souvent même frais. Nous avons reçu des foyers améliorés mais avec quoi allons-nous trouver le morceau de bois que nous devons utiliser ? », se demande Rachel Mamoudou, ménagère à Maroua.
Cet exercice n’est pas sans conséquences sur les efforts consentis dans la lutte contre l’avancée du désert. Le Cameroun assistant aujourd’hui à la dégradation exponentielle de ses sols. 12 millions d’hectares de terre dégradée, à en croire le service de lutte contre la désertification au ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable (Minepded).
Point focal de la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification (Unccd) votée en 1994, David Payan, géographe et environnementaliste, regrette : « Les activités humaines (prélèvements abusifs des ressources naturelles, le surpâturage, la déforestation…) et les variations climatiques. Celles-ci ont pour conséquences la dégradation des sols et l’amenuisement du couvert végétal ». Ces nuisances humaines pour la nature vont jusqu’aux feux de brousse qui déciment le couvert végétal.
« Disons que lorsqu’on parle de lutte contre la désertification, on ne doit pas seulement se limiter à la plantation des arbres. A côté de ceci, il faut penser à la régénération des herbes qui fait la fierté des populations qui les utilisent pour tisser les nattes, les haies de leurs habitations, les chapeaux, comme foin pour les bêtes dans cette zone agro-pastorale, etc. Or, à cause des conditions climatiques, ces herbes s’assèchent », souligne David Payan.
Relancée en 2008 par le Minepded, l’Opération Sahel vert qui date des années 70 au Cameroun a déjà permis « de restaurer 26.000 ha de par des techniques reboisement. Environ 60 sites de reboisement ont été créés depuis 2008 dans les communes de l’Extrême-Nord», évalue notre géographe environnementaliste.
Parlant de la rareté du bois de chauffe à laquelle sont confrontées les populations du septentrion, le chef de la Section du développement durable au ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable pense qu’elle perturbe énormément les projets de boisement et de reboisement dans cette partie du pays. Stève Alex Ondoa, qui se convainc de ce que le désert n’est plus une menace que pour le grand nord du Cameroun, au vu de la proportion importante des terres dégradées, souhaite que le gaz domestique soit subventionné afin de permettre son accessibilité par la majorité des ménages.
En attendant qu’une telle suggestion se concrétise, le Cameroun qui a déjà ratifié la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification (Unccd) votée en 1994, a adhéré au Programme Grande Muraille Verte.
Le désert est la cause de la pauvreté, d’insécurité et une menace pour la faune
Ce programme, qui s’étend sur une longueur de 7500 km, a été lancé en 2007 par les chefs d’Etat et de gouvernements de l’Union africaine pour l’amélioration de la sécurité alimentaire, et le soutien des écosystèmes afin de s’adapter aux changements climatiques. Le ministre Pierre Hélé voit plus grand. « La Grande Muraille verte est un moyen de mobilisation des ressources et un engagement politique; il booste la mutualisation des efforts au niveau régional. Ceci peut être considéré comme la concrétisation d’un souhait émis en février 2016. Souhait faisant suite à la participation du chef de l’Etat Paul Biya à la rencontre de haut niveau sur l’initiative Grande Muraille verte lors de la 21ème Conférence des Nations unies sur le climat (Cop21) à Paris », spécifiait le Minepded, le 23 mai 2017, au cours du lancement de l’initiative de la Grande Muraille Verte à Yaoundé.
Les arguments du Cameroun pour son admission à cette initiative s’appuient sur les tendances croissantes de variabilité climatique, la dégradation des terres spécifiquement, le Grand Nord qui est aride. Notons que le Bassin du Lac Tchad dont le Cameroun fait partie à travers l’Extrême nord du pays a déjà perdu presque 90% de son territoire au cours des trente dernières années.
Mais d’autres régions comme les hautes savanes soudano-guinéennes, le plateau de l’Adamaoua et les hauts plateaux de l’Ouest subissent la dégradation et la sécheresse.
La 23ème édition de la Journée mondiale de la lutte contre la désertification a été célébrée le 17 juin dernier sur le thème « Notre terre. Notre maison. Notre futur». Pour les autorités en charge de l’Environnement, c’est un appel à la prise de conscience pour des actes responsables visant à stopper l’avancée de la dégradation des sols et du désert. Douze millions d’hectares de terre sont dégradés au Cameroun. Le désert étant la cause de la pauvreté, d’insécurité et une menace pour la faune.
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