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Déforestation effrénée, mal gouvernance forestière et absence de transparence dans la gestion sont quelques craintes recensées comme potentielles conséquences de la rupture de l’Accord de partenariat volontaire entre  l’ institution européenne et le Pays qui possède le deuxième massif forestier du Bassin du Congo après la RDC.  

D’après l’ APV, le bois exporté dans les Pays de l’UE devrait détenir une autorisation Flegt , indiquant la conformité avec la réglémentation du pays exportateur.
Source:agriculture.gouv.fr

 En 2011, le Cameroun a ratifié l’APV–Flegt, l’Accord de Partenariat Volontaire sur l’application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux des bois et produits vers l’Union Européenne (UE). Cet outil devrait permettre d’améliorer la gouvernance forestière du pays et de s’assurer que le bois importé dans l’Union européenne remplit toutes les exigences réglementaires du pays partenaire. Mais 13 ans après avoir pris cet engagement, le pays du Bassin du Congo peine à implémenter les mesures.

« Malgré les tentatives de l’UE, la République du Cameroun n’a pas été en mesure de remplir ses obligations au titre de l’APV, notamment pour ce qui est de la mise en place du régime d’autorisation FLEGT, qui vise à vérifier et attester au moyen d’une autorisation FLEGT que le bois et les produits dérivés exportés vers l’Union européenne ont été produits ou acquis légalement. » affirme la Commission Européenne  dans une proposition relative à la dénonciation de l’accord entre l’UE et le Cameroun. Dans le document rendu public le 2 octobre dernier, « la Commission estime que l’APV ne satisfait plus à l’exigence d’«utilité» visée au reflet 81 du règlement de l’UE sur la déforestation ». 

Dans le document disponible sur le site officiel de l’UE, entre autres griefs, on peut lire que « les objectifs de l’APV, et notamment le régime d’autorisation FLEGT, ne cadrent pas avec la politique adoptée par la République du Cameroun à l’égard de ce secteur. La poursuite de l’APV en dépit de ces difficultés pourrait nuire à la crédibilité de l’UE en tant que porte-drapeau à l’échelle mondiale des questions liées à la protection des forêts et à la biodiversité et porter préjudice à l’intégrité des APV en tant qu’ instruments commerciaux de l’UE ». 

Aussi, pour la Commission européenne, la dénonciation de l’APV avec la République du Cameroun est la solution la plus appropriée. Conformément à l’article 27 de l’APV, l’Union Européenne doit notifier à la République du Cameroun sa décision de dénoncer l’APV au plus tard le 30 novembre 2024, afin qu’il ne soit pas renouvelé par reconduction tacite.

 En effet, l’article suscité dispose que ce dernier est renouvelé par tacite reconduction tous les sept ans, sauf pour une partie à y renoncer en notifiant à l’autre sa décision au moins 12 mois avant l’expiration de la période de sept ans en cours. La période de sept ans en cours expire le 30 novembre 2025. 

Nonobstant l’article 27, l’une ou l’autre partie peut dénoncer l’APV en le notifiant à l’autre, conformément à l’article 28 de l’APV. L’APV cesse de s’appliquer 12 mois après la date de cette notification. D’où la sortie épistolaire de la Commission Européenne qui n’est pas satisfaite de la tournure prise dans son engagement avec l’Etat du Cameroun en matière de gestion durable de ses forêts. Quand l’APV est  entré en vigueur le 1er décembre 2011,les parties s’étaient engagées à prendre toutes les mesures nécessaires à la mise en œuvre du régime d’autorisation FLEGT, s’accordant sur un calendrier de mise en œuvre qui fait partie intégrante du programme.  

 Non Opérationnel 

Suivant ce calendrier, le régime d’autorisation aurait dû être mis en place dans les cinq ans suivant la réforme du cadre juridique, l’amélioration des systèmes nationaux de contrôle et la mise en place du système de vérification de la légalité et du système de traçabilité, qui auraient toutes dues être terminées dans un délai de trois à quatre ans.

 Le Cameroun s’était alors fixé un calendrier des plus ambitieux pour bien marquer sa volonté politique, renforcer la dynamique naissante parmi l’ensemble des parties prenantes et mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre de l’APV.

Seulement, « Cela fait 13 ans désormais que l’APV est entré en vigueur et le régime d’autorisation FLEGT n’a toujours pas vu le jour, ce qui revient à dire que l’APV n’est pas opérationnel. La volonté politique du Cameroun s’est estompée, ce qui s’est avéré préjudiciable à la mise en œuvre de l’APV et à l’engagement pris par la République du Cameroun d’atteindre ses objectifs, en particulier en ce qui concerne la délivrance d’autorisations FLEGT », dénonce la Commission de l’Européenne.

Pour l’institution, la réforme du cadre juridique n’a pas abouti et l’exploitation des forêts s’effectue toujours en partie sur la base de petits titres d’exploitation à savoir les ventes de coupe, ne nécessitant aucun plan d’aménagement. « Les systèmes nationaux de contrôle ne sont pas opérationnels, de sorte que l’application des réglementations et la gouvernance demeurent médiocres, permettant la poursuite d’opérations d’abattage illégales et portant atteinte à l’environnement ».

La Commission Européenne dénonce aussi le fait que  « la mise au point du module de vérification de la légalité intégré dans le système de traçabilité est toujours en cours et les rares progrès accomplis à ce jour n’ont toujours fait l’objet d’aucun audit indépendant susceptible d’attester sa crédibilité ». Elle  fait ici référence au Système informatique de gestion de l’information forestière de deuxième génération (Sigif II), lancé le 1er avril 2021 par le Cameroun et présenté comme l’outil par excellence de traçabilité et de légalité dans les exportations des bois camerounais sur le marché européen. 

Dans le 1er article de la serie “‘Looted Forests”, InfoCongo souligne que ce système n’avait pas obtenu une reception favorable de la part de ses principaux financiers, l’UE et la Coopration allemande, qui ont enstimé que la version présentée du SIGIF II  n’est pas l’instrument attendu dans le cadre de l’APV Flegt.  « les certificats émis par le système ne pourront pas être reconnus ou validés dans le cadre du Règlement bois de l’Union européenne (RBUE), et encore moins dans le cadre de futures autorisations Flegt » ,  commentaient l’UE et la Coopération allemande.

Du côté du Cameroun pourtant, l’on se vantait d’accomplir des prouesses malgré des difficultés techniques liées au débit d’Internet reconnues, car le SIGIF II a permis la dématérialisation des procédures de gestion forestière et l’amélioration des recettes tout en réduisant les poches de corruption souvent favorisées par le contact direct des usagers avec le personnel.

« Si l’Apv-Flegt est suspendu pour le Cameroun, les conséquences seront désastreuses.»

Selon le bilan présenté par le ministre des Forêts et de la Faune en mai 2022, 617 structures ont été enregistrées dans le système. 1556 comptes utilisateurs ont été créés par l’Administration et les opérateurs ; 180 demandes de certificats de matérialisation des limites soumises par les opérateurs dans le système, pour ne citer que ces résultats. 

La situation qui prévaut actuellement après cette proposition de la Commission européenne ne laisse pas indifférent. Dans les rangs de la société civile, c’est le branle-bas. Si l’on affirme comprendre les motivations, l’on se demande si elles nécessitent d’en arriver à une résiliation de l’APV-Flegt dont on salue les nombreux apports. « C’est grâce à ce processus qu’on a quand même noté une forte participation des acteurs dans la gouvernance forestière », affirme un acteur de la société civile sous anonymat. Ce dernier craint la perte de cet acquis si la rupture de l’accord était avérée. Ce qui laisserait à son avis libre cours à un certain nombre de dérives dont les prémices sont d’ores et déjà perceptibles.

« Si l’Apv-Flegt est suspendu pour le Cameroun, les conséquences seront désastreuses. La tendance au niveau du Ministère des forêts et de la Faune est de réduire l’espace aux autres acteurs impliqués dans la gouvernance forestière notamment les acteurs de la société civile, à voir la circulaire qui indique que pour intervenir dans le secteur des forêts, il faut avoir un cadre de collaboration avec le ministère», commente cette source.

 Une autre toujours sous anonymat parle de « caporisation » des échanges entre le Minfof et les acteurs de la société et souligne que cela affecte le niveau de transparence dans le secteur et en termes d’application des lois risque de prendre un coup et accentuer la mauvaise gouvernance dans le secteur forestier. « Les conséquences seront énormes. Avec l’Apv-Flegt, on avait eu certains acquis qui permettaient à ce que nous puissions travailler de façon sereine », regrette-t-elle déjà. Toutes prescrivent le retour à la table des négociations. 

Sur sa page Linkedin , Jean Marc Chataigner, Ambassadeur de l’Union Européenne au Cameroun, rassure : « la décision européenne de mettre fin à l’accord de partenariat volontaire sur la gestion des forêts APV FLEGT avec le Cameroun (qui doit encore être approuvée par le Conseil européen) ne signifie pas la fin de notre engagement 🇪🇺 pour la gestion durable des forêts ; encore moins notre retrait des actions de lutte contre la déforestation et la préservation de la biodiversité ! » affirme le diplomate. 

Pourtant, Il rappelle qu’après 20 ans d’efforts pour le déplorer, le FLEGT n’a en général pas apporté les résultats escomptés et les licences FLEGT ne sont toujours pas reconnues en dehors de l’Union européenne. « Nous terminerons donc ces engagements avec un grand nombre de pays (et pas seulement le Cameroun) entre 2024 et 2025. La période de transition et d’achèvement de l’APV FLEGT (il existe encore une année de mise en œuvre après la décision à venir du Conseil) doit permettre, de mon point de vue, d’intensifier nos efforts en vue de la conclusion la plus rapide possible d’un nouveau partenariat forêts entre l’Union européenne et le Cameroun pour appuyer de façon plus inclusive et ambitieuse le pays dans la gestion durable des forêts ».

 Parmi les pistes du nouveau partenariat en perspective, pourraient à son avis, être inclus des actions et des programmes de renforcement du rôle des forêts dans le développement durable national ; d’appui à la gestion forestière ; d’appui à un cadre d’investissements pour une économie forestière durable ; de continuation du dialogue et des efforts de coopération régionale.

La version originale de cet article a été publié par Enquete de Solutions.

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