Virunga : une aire protégée, victime des revendications de terres et de ressources

Sorry, this entry is only available in French. Le parc national des Virunga, le plus vieil espace de conservation de la biodiversité en Afrique, est victime de récurrentes attaques armées depuis le début de l’année 2018. La plus récente est celle perpétrée par le groupe armé Mai-Mai, le 9 avril dernier, et décrite comme la […]

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Le parc national des Virunga, le plus vieil espace de conservation de la biodiversité en Afrique, est victime de récurrentes attaques armées depuis le début de l’année 2018. La plus récente est celle perpétrée par le groupe armé Mai-Mai, le 9 avril dernier, et décrite comme la plus meurtrière contre le personnel du parc des Virunga par l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature. A ce jour, cette structure étatique a dénombré au total de 176 rangers morts en service dans l’histoire récente du parc.

A ce jour, plus de 150 écogardes ont été tué en exercice au Parc des Virunga

A ce jour, plus de 150 écogardes ont été tué en exercice au Parc des Virunga

Des attaques par plusieurs acteurs pour des revendications parfois inconnues

Christophe Vogel est chercheur sur les questions de groupes armés dans la région de Grands-Lacs. Dans un entretien à InfoCongo, ce spécialiste sur les questions sécuritaires de la zone orientale de la RDC pense qu’il faudra utiliser une méthode appropriée pour mieux cerner les causes et l’identité des auteurs de ces attaques contre le parc de Virunga. « Etant donné le nombre des groupes armés qui opèrent dans et autour du parc, il est nécessaire davantage d’analyser chaque incident pour mieux comprendre les motifs et potentiels auteurs de cette attaque », explique-t-il.

« Le parc de Virunga, depuis de nombreuses années et malgré plusieurs initiatives socio-économiques, fait face à des multiples revendications de terres et de ressources par différentes communautés riveraines et acteurs armés », renchérit Vogel. Pour lui, il est indispensable de s’attaquer aux racines de cette contestation d’autorité publique, et de trouver des compromis pragmatiques afin de réconcilier les besoins des populations pour de supprimer davantage la légitimité des groupes armés ».

Pour sa part Esther Marijnen, Chercheure en écologie, politique des conflits armés, groupes rebelles, ressources et conservation militarisée à l’organisation Conflict Research Group, une unité de recherche multidisciplinaire de l’Université de Ghent en Belgique, explique que le conflit sur les limites du parc est un problème de longue date. « Certains groupes rebelles utilisent ce problème pour gagner le soutien de certaines personnes vivant autour du parc. Les groupes rebelles offrent la possibilité aux populations riveraines du parc de cultiver dans l’espace protégé en contre partie des taxes souvent obtenus par l’extorsion. Tant que le conflit sur les limites du parc n’est pas résolu, il existera beaucoup de mécontentement des civils par rapport au parc et ses agents. Ce qui constitue une situation difficile et risquée pour le personnel du parc », fait remarquer Marijnen.

Les attaques croissantes contre les éco-gardes se produisent principalement dans le secteur central du parc, autour du lac Edouard .Les gardes du parc travaillent actuellement avec les troupes de l’armée congolaise, FARDC, dans une offensive visant à dégarnir l’aire protégée de toute présence de groupes rebelles. « Cet engagement fait des gardes du parc le principal ennemi des groupes rebelles actifs dans la région » détaille Marijnen, ajoutant que les offensives armées lancées par les gardes par et les soldats de l’armée gouvernementale ont permis la reprise du contrôle de tous les villages de pêche illicites autour du lac Edouard, jadis grenier et source de financement de ces groupes armés.

Malheureusement ces interventions n’ont pas eu un effet durable et, à la place, les groupes rebelles ont repris le contrôle de ces villages par la force et il est important de savoir quel groupe rebelle est derrière chaque attaque. « Ceci est important pour éviter les attaques dans le futur et pour comprendre les motivations de ces groupes » interpelle la chercheuse. Le tourisme dans le parc des Virunga est-il en péril ? Au lendemain de l’enlèvement de deux touristes Britanniques le 11 mai dernier dans une embuscade armée, ayant causé la mort de Rachel Katumwa, jeune ranger de 25 ans, la direction du parc national des Virunga a annoncé la suspension momentanée du tourisme dans cet espace.

Funérailles de Rachel Katumwa, ex-écogarde de Virunga, décédée en mai dernier lors de l'attaque de son convoi.

Funérailles de Rachel Katumwa, ex-écogarde de Virunga, décédée en mai dernier lors de l’attaque de son convoi.

Pour Christoph Vogel, il est actuellement difficile de calculer l’impact de ces attaques sur les activités touristiques car jusqu’à présent, ces attaques n’ont rarement touché les zones touristiques du parc. « Néanmoins, de tels incident peuvent à la fois mettre à risque l’attractivité du parc pour des touristes étrangers mais aussi ramener un sentiment de solidarité de la part de ces derniers » pense-t-il.

A ce jour, le tourisme est officiellement suspendu dans le parc national des Virunga jusqu’au 4 juin prochain. Toutefois, l’on craint que le parc ne puisse rouvrir tant que la sécurité des visiteurs ne sera pas garantie. Certains craignent que cela puisse prendre un an ou plus, une menace pour la viabilité économique du parc.

Toutefois, selon Esther Marijnen, de nombreuses attaques se sont produites dans le secteur central du parc, alors que la plupart des touristes viennent dans le secteur sud. «Je ne sais pas si cela aura eu un impact sur le nombre de touristes qui se rendent au parc national des Virunga », ajoute-t-elle.

Une nouvelle approche pour stopper les attaques

Le chercheur Christoph Vogel est d’avis que les outils de nouvelles technologies de la communication et électroniques sont susceptibles de contribuer positivement à la lutte pour l’éradication de l’insécurité au sein du parc national de Virunga.

Mais pour y parvenir, les préalables ci-après doivent être pris en compte recommande-t-il : « Les drones en tant que tels sont ambivalents. Comme observé pour le cas de la Monusco (mission Onusienne en RDC), leur efficacité dépend largement de leur qualité visuelle des données. A ce point, certes, les drones de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature, ICCN, autant que ceux de la Monusco ne sont pas encore au point parfait. D’autant plus que de telles images dépendent d’autres facteurs notamment la démarcation en tant que telle-tant que cette dernière ne sera pas plus claire, et agréée par tous, une image de drone seule ne peut fournir une vérité absolue sur des questions d’outrer-passage de limites, une de majeures sources de conflits dans cette zone de conservation ».

Par contre Esther Marijnen voit en l’actuelle offensive militaire une grande exposition de rangers à la rage de représailles de groupes rebelles. « L’ICCN mais aussi le parc des Virunga, car le parc est géré sur la base d’un partenariat public-privé, doivent repenser leur approche pour contrer les groupes rebelles dans le parc. L’approche militaire actuelle met en péril la vie des gardes de parc », déplore la spécialiste en conservation militarisée.

« Certains gardes parc m’ont dit qu’ils ont de plus en plus peur de patrouiller dans le secteur central et qu’ils sont démoralisés. Traiter les groupes rebelles n’est bien sûr pas seulement la responsabilité du comité de gestion du parc des Virunga. Le gouvernement Congolais doit penser à une solution politique face à la présence de groupes rebelles dans le parc. Cela ne devrait pas être la responsabilité principale des conservationnistes », conclut-elle.

Dans une alerte publiée le 3 mai dernier, l’ONG internationale Global Witness, a appelé la RDC à mettre fin à son projet visant à autoriser l’exploration pétrolière dans des sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco. L’organisation internationales indique s’être basée sur des documents révélant que le gouvernement de la République démocratique du Congo tente actuellement de modifier le classement de vastes étendues faisant partie de deux sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO – les parcs nationaux de la Salonga et des Virunga pour permettre le lancement d’activités d’exploration pétrolière.

« Une activité pétrolière dans ces parcs nationaux protégés aurait des conséquences catastrophiques sur leurs écosystèmes uniques, mettant en danger plusieurs espèces rares et emblématiques, outre le fait qu’elle porterait atteinte à la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO, dont la RD Congo est signataire. Il faut immédiatement mettre un terme à ces nouvelles mesures visant l’ouverture des parcs » écrit la note d’alerte de Global Witness.

Au cours du même mois, une forte délégation mixte du gouvernement centrale de la République démocratique du Congo et de l’institut congolais pour la conservation de la nature a mené une mission dans les principales agglomérations situées sur les limites contestées avec le parc national des Virunga. S’adressant à la population de la cité de Kasindi (frontalière avec l’Ouganda et ayant une limite contestée avec le secteur nord du parc de Virunga), Daniel Kisaka Yereyere, ministre national de la pêche et membre de la délégation interministérielles avait annoncé que la mission de cette délégation était de trouver une solution durable et consensuelle aux conflits de limite du parc entre les gestionnaires de cet aire protégée et les communautés riveraines.

« Notre délégation est venue visiter les sites présentant des conflits de limites entre les communautés riveraines et l’ICCN. Elle a récolté les doléances des uns et des autres de chacune de parties en opposition, qu’elle ramène à Kinshasa, où sera prise une décision définitive quant aux limites du parc national des Virunga » avait-il conclu lors de son adresse à la population de Kasindi.

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